Barack Obama est propulsé dans les sondages
Oussama vaincu, Obama pas invincible - SwissInfo
Par Marie-Christine Bonzom, Washington, swissinfo.ch
Barack Obama est le président américain qui a obtenu la mort d’Oussama Ben Laden. L’évènement le propulse dans les sondages, mais ne le rend pas invincible à l’approche des présidentielles de 2012. Enquête auprès d’experts et d’électeurs américains, pour certains, d’origine suisse.
Les Américains ont resserré les rangs derrière leur président après le raid meurtrier contre Oussama Ben Laden. Les félicitations à Barack Obama ont afflué, y compris celles de George Bush et Dick Cheney.
«Ce qui nous unit est bien plus grand que ce qui nous divise», a déclaré le président républicain de la Chambre, John Boehner. Même Rush Limbaugh, le commentateur de droite le plus célèbre et le plus acerbe, n’a pas hésité à «remercier Dieu pour le président Obama.»
«L’élimination de Ben Laden est un succès pour Obama car les attentats de 2001 furent une immense tragédie nationale qui a changé le sentiment de sécurité que nous avions à l’intérieur de notre pays et qui a eu un impact important sur notre vie quotidienne», estime Emmely, habitante du Wisconsin d’origine suisse qui a souhaité garder l’anonymat. Et, dont le beau-fils est mort dans l’effondrement du World Trade Center.
Une image de leader
Le raid contre Oussama Ben Laden est intervenu moins d’un mois après que Barack Obama a lancé sa campagne en vue des présidentielles de novembre 2012.
Barack Obama entre dans l’Histoire comme le président qui a éliminé l’ennemi public numéro un des Américains. Atout incontestable pour un homme qui brigue un second mandat, surtout quand celui-là était au plus bas dans les sondages auparavant. Depuis, il enregistre une remontée de popularité et son image en tant que leader - l’un de ses points faibles jusqu’ici - est améliorée.
«Ordonner le raid contre Ben Laden était une décision difficile et le président apparaît maintenant comme un dirigeant solide», estime Emmely qui a voté pour M. Obama en 2008, mais qui se définit comme indépendante.
«Mon opinion sur Obama est remontée car il a pris une bonne décision en ordonnant ce raid», dit Don Louie, électeur indépendant en Virginie qui a voté pour Barack Obama et qui, avant la mort du chef d’Al-Qaïda, pensait que le président «donnait l’impression de ne pas être un vrai dirigeant.»
Cependant, l’ampleur du coup de pouce à Barack Obama varie d’un sondage à l’autre. Elle est aussi très inférieure à celle qui catapulta George Bush au-delà de la barre des 80% de satisfaits après le 11 septembre 2001 et qui le maintint au-dessus de 60% pendant un an.
Ce qui amène Greg Wierzynski, ancien du magazine Time qui a grandi en Suisse et qui est de tendance républicaine, à juger que «si la mort de Ben Laden est un plus énorme pour Obama, le coup de pouce ne va pas durer longtemps.»
Le New York Times, quotidien démocrate, observe d’ailleurs qu’il est «fréquent pour les présidents américains de voir leur position se renforcer dans l’opinion après un succès militaire ou international important, mais il est moins fréquent de les voir conserver cette position.»
John Moore, le militant démocrate dont le grand-père émigra de Berne. (swissinfo)
Rien n’est gagné
Invincible, Barack Obama ne l’est donc pas. «Sa situation est inchangée, et dans certains sondages, elle se détériore pour ce qui est de sa gestion des affaires intérieures comme le chômage et le déficit», note Andrew Bacevich, de l’université de Boston.
Or, avertit le professeur, «la présidentielle de 2012, comme les précédentes, portera plus sur l’économie que sur les dossiers internationaux.»
Les dissensions au sein du parti républicain, notamment la mouvance du Tea Party, pourraient faire le jeu du président Obama. Mais il devra ne pas sous-estimer l’opposition.
«Les Républicains n’ont pas de candidat crédible pour le moment mais ils ont beaucoup d’argent et d’influence à travers le pays, surtout auprès des idiots qui suivent Rush Limbaugh et Fox News», lance John Moore, militant démocrate dont le grand-père émigra de Berne.
Greg Wierzynski admet que les Républicains n’ont pas encore de candidat sérieux mais il souligne que «les campagnes présidentielles transforment parfois un candidat inconnu en personnalité importante, comme Bill Clinton qui gagna face à un Papa Bush qui semblait imbattable.»
Barack Obama devra aussi remobiliser les électeurs qu’il a déçus. Les déçus d’Obama se trouvent sur l’aile gauche du parti démocrate et parmi les indépendants.
Pour eux, le changement n’est pas aussi fondamental qu’ils l’avaient espéré. Ils citent souvent la réforme de santé et l’escalade en Afghanistan. Pour Barack Obama, le risque majeur est de voir les déçus indépendants s’abstenir ou voter Républicain.
«La mort de Ben Laden n’efface pas ma déception dans Obama, je n’ai jamais voté Républicain pour la présidence mais je vais l’envisager», prévient Don Louie.
Emmely, l’indépendante du Wisconsin, prévient aussi qu’elle «garde toujours l’esprit ouvert» face aux candidats à la Maison Blanche des deux partis. Elle paraît néanmoins gênée par l’évolution du parti républicain. «Le Tea Party et Sarah Palin ont brouillé l’identité du parti républicain, ils sont d’extrême-droite et je ne pourrai jamais adhérer à leurs activités», confie-t-elle.
Marie-Christine Bonzom, Washington, swissinfo.ch
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